Le temps serait-il venu de miser sur les études collégiales?

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Pendant des décennies, les études universitaires ont été considérées comme le parcours à privilégier pour les jeunes Canadiens. Les parents et les éducateurs ont défini le système universitaire comme le moyen de trouver un emploi, d’assurer sa sécurité financière, d’atteindre la richesse et de mener une vie gratifiante. Les employeurs, quant à eux, ont développé une sorte de « diplomanie » qui renforce ces idées.

Toutefois, la situation a-t-elle changé?

Ne vous méprenez pas. Le bon diplôme universitaire dans le bon domaine peut encore faire des merveilles pour un jeune au Canada. Toutefois, quel rôle jouent les autres établissements d’enseignement – particulièrement au niveau collégial – dans le cheminement des étudiants vers le marché de l’emploi? Accorde-t-on trop d’importance aux universités? Le temps est-il venu pour les collèges de recevoir la reconnaissance qu’ils méritent?
Au Canada, nous avons la chance de profiter d’une pléthore d’excellentes options d’éducation postsecondaire reconnues dans le monde entier. Toutefois, les cégeps, collèges et écoles de métiers sont souvent boudés par les parents et les étudiants. Ken Coates, titulaire de la chaire de recherche du Canada sur l’innovation régionale à la Johnson-Shoyama Graduate School of Public Policy de la University of Saskatchewan, fait remarquer qu’il suffit de voir à quel point nos grandes écoles polytechniques – le Red River College, le Sheridan College, le Seneca College, le Humber College, le NAIT, le SAIT et le BCIT – occupent des places de chefs de file sur la scène internationale pour comprendre que nos collèges se démarquent1.

Dans son ouvrage Dream Factories: Why Universities Won’t Solve the Youth Jobs Crisis, Coates et son coauteur Bill Morrison indiquent que nous avons fait la promotion des universités comme d’un « passeport vers la réussite professionnelle ». Le résultat? Beaucoup de jeunes gens lourdement endettés par leurs études n’arrivent pas à trouver ces emplois de rêve qu’on leur avait promis.

Ces emplois sont moins nombreux, s’ils ne sont pas carrément disparus. Cependant, la fierté qu’apporte le fait d’envoyer son enfant à l’université continue de faire de l’ombre aux autres excellentes possibilités qu’offrent les diplômes collégiaux et polytechniques.

Dans certains domaines (et métiers), ces options sont non seulement d’excellentes voies vers la réussite, mais aussi de meilleurs chemins à suivre pour ouvrir les portes.

En fait, je dirais même que dans de nombreuses industries canadiennes, les études collégiales sont à privilégier.

Je le pense pour plusieurs raisons.

Il ne fait aucun doute que tous les établissements d’enseignement doivent s’adapter au marché. Les possibilités d’études universitaires sont très nombreuses. Toutefois, bon nombre de programmes sont solidement ancrés dans la tradition. Les établissements collégiaux sont souvent plus enclins à s’adapter aux conditions du marché de l’emploi. Là encore, Coates cite l’Assiniboine College, l’University of the North et l’École technique et professionnelle parmi les nombreux établissements d’études collégiales qui, franchement, parviennent à répondre extrêmement bien aux besoins des jeunes qui souhaitent intégrer le marché du travail.
Ce n’est pas que nos universités soient « mauvaises ». En fait, nous avons de bonnes universités internationalement reconnues2. Il suffit de penser à l’University of Toronto, à l’Université McGill et à UBC. Cependant, les collèges canadiens ont prouvé leur capacité à offrir l’éducation qui permet d’accéder aux emplois sollicités. Au Canada, bon nombre de diplômés universitaires complètent leur éducation au moyen d’un programme collégial ou polytechnique afin de trouver un emploi lucratif.

Linda Franklin, présidente-directrice générale de Collèges Ontario, l’association de promotion des intérêts et de sensibilisation des collèges et instituts de technologie de l’Ontario, fait remarquer que le nombre de diplômés universitaires inscrits dans les établissements qu’elle représente a augmenté de 40 % de 2008 à 20133.

Cela en dit long. Cependant, pour tout dire, je dois tout de même préciser que Christopher Manfredi, provost et vice-recteur à l’Université McGill, indique que 12 % des titulaires de baccalauréat en 2009 et 2010 avaient déjà complété un programme dans un collège ou une école de métier avant d’obtenir leur diplôme universitaire. Il affirme aussi que nous entrons dans une nouvelle ère d’apprentissage continu. Je suis totalement d’accord avec lui. Néanmoins, la valeur de l’éducation qu’offrent les collèges et écoles de métier est tout de même difficile à remettre en question.

Je crois que nous continuons à pousser nos enfants à aller à l’université malgré les frais de scolarité élevés et la faible valeur des diplômes sur le marché de l’emploi en partie en raison de croyances au sujet de ces établissements, mais aussi en raison de mythes sur l’éducation collégiale.

Attaquons-nous donc à quelques-uns de ces mythes :

  • « Mon enfant est intelligent. Il devrait donc aller à l’université. » : C’est tout à fait faux. Les collèges ont évolué. Les études collégiales peuvent être tout aussi ardues que les études universitaires, et les diplômes collégiaux, tout aussi difficiles à obtenir que les diplômés universitaires.

    Les collèges donnent à bon nombre de diplômés d’aujourd’hui les compétences requises pour les carrières les plus sollicitées – maintenant et dans le futur. Détrompez-vous : les collèges canadiens regorgent d’étudiants intelligents et doués.

  • Il faut un diplôme universitaire pour trouver de l’emploi. : Avant de subir une chirurgie, vous voulez être certain que votre chirurgien est un médecin. Toutefois, quand avez-vous demandé à votre électricien ou à votre plombier quelle université il a fréquentée?

    En fait, les liens étroits entre l’industrie et les collèges font d’excellents tremplins pour lancer une carrière. La plupart des collèges ont d’excellents contacts avec le marché du travail local et régional. Ils prennent soin de diriger les diplômés vers les débouchés professionnels4.

  • Les « bons emplois » qui exigent un diplôme universitaire sont les emplois les plus lucratifs : Là encore, je dois reconnaître que certaines carrières qui nécessitent un diplôme universitaire – chirurgien ou ingénieur par exemple – rapportent beaucoup d’argent. Cependant, personne ne peut dire que les électriciens et les plombiers grattent les fonds de tiroir. Les collèges, instituts polytechniques et écoles de métiers permettent d’accéder à d’excellents emplois, particulièrement dans le domaine des métiers. En fait, comme je l’ai déjà mentionné dans un article de blogue5, on observe une vraie pénurie de travailleurs spécialisés, et la situation ne pourra que s’aggraver.

electrician

Une étude récente du Centre for the Study of Living Standards a récemment déterminé que le nombre de personnes à faible revenu titulaires d’une maîtrise ou d’un doctorat augmentait.

Depuis 1997, le nombre de ces diplômés gagnant un faible revenu est passé de 7,7 % des travailleurs âgés de 20 à 64 ans à 12,4 % en 2014, ce qui est énorme. Bien que ce groupe soit encore le plus petit parmi les travailleurs à faible revenu, la hausse est fulgurante comparativement à celle constatée chez les diplômés collégiaux (de 23,4 % à 24,1 % au cours de la même période). Les diplômes d’études supérieures ne garantissent pas un revenu supérieur.

« Ceci suggère que la demande d’emplois payants a dépassé l’offre », fait remarquer l’auteur de l’étude, l’économiste Jasmin Thomas.

En tant que parents, employeurs, éducateurs et gens de l’industrie, nous devons revoir le message que nous envoyons à nos jeunes sur l’éducation postsecondaire. Il est temps de redonner à nos collèges ce qui leur revient. Ils le méritent, tout comme leurs diplômés.

Références (en anglais seulement)

  1. http://www.cbc.ca/news/canada/manitoba/university-vs-college-why-pressuring-your-kid-to-go-to-university-is-a-big-mistake-1.2755051
  2. https://www.timeshighereducation.com/world-university-rankings/2016/world-ranking#!/page/0/length/25/sort_by/rank_label/sort_order/asc/cols/rank_only
  3. http://www.theglobeandmail.com/news/national/education/university-grads-see-college-diploma-as-key-to-jobs/article15375257/
  4. http://www.cbc.ca/news/canada/manitoba/university-vs-college-why-pressuring-your-kid-to-go-to-university-is-a-big-mistake-1.2755051
  5. http://insights.castle.ca/where-have-all-the-tradespeople-gone/
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Ken Jenkins
Ken travaille dans le marché du bois et des matériaux de construction depuis plus de 17 ans. Il a entre autres cumulé de l’expérience à la haute direction dans le domaine de la fabrication de produits de construction. Il a une compréhension aiguë de la relation entre les fournisseurs, les fabricants et les marchands indépendants ainsi qu’une profonde connaissance des entrepreneurs et de la clientèle de chaque région du pays. La priorité de Ken pour Castle est de « toujours acheter à des prix concurrentiels » afin que ses marchands indépendants demeurent dans la course. « Ainsi, les actionnaires de Castle obtiennent un meilleur rendement aujourd’hui que jamais auparavant. Rien ne témoigne mieux de la force de l’équipe que nous avons bâtie, souligne Ken. Mon travail est de continuer à la renforcer. »